Alors que le ministre des Finances a récemment dénoncé les fraudes commises par l’usine FOMI dans la distribution des engrais chimiques, certaines organisations locales s’insurgent contre ces pratiques jugées malhonnêtes. Elles estiment que ces irrégularités sont aggravées par la pénurie d’engrais pour de nombreux agriculteurs. Selon elles, l’État devrait mener des enquêtes approfondies sur ces fraudes et prendre des mesures strictes afin d’y mettre un terme.

Selon Jean-Bosco Ndereyimana, président de l’association Action des Burundais pour la reconstruction de l’Afrique (ABBA), les récentes déclarations du ministre des Finances concernant les fraudes au sein de l’usine de fertilisants FOMI soulèvent de vives inquiétudes.
« Les révélations du ministre des Finances, suscitent vraiment trop d’inquiétude sur la gestion de la chose publique, mais aussi nous voyons ici le manque de patriotisme de certains gestionnaires de la chose publique. Nous constatons qu’il y a des gens, au lieu de travailler pour le peuple afin d’atteindre la vision 2040-2060, ils ne font que vouloir s’enrichir au détriment de la population, ce qui est dangereux. »
Il demande qu’il y ait des enquêtes pour que la vérité sur la gestion de l’engrais de l’entreprise FOMI puisse éclater.
« Nous voyons ici qu’il y a des personnes parmi la population qui ont encore des reçus de paiement en attendant qu’ils reçoivent de l’engrais. Nous espérons que la vérité sera mise à jour. Nous conseillerons à ceux qui ont eu la confiance du Président de la République, d’être vraiment des patriotes pour mieux servir la population afin de développer notre pays », a-t-il ajouté.
La PARCEM recommande la conduite d’enquêtes approfondies

D’après Faustin Ndikumana, directeur national de la Parole et l’action pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités (PARCEM), l’usine FOMI demande beaucoup de moyens au gouvernement alors que les fertilisants restent insuffisants.
« Même l’année budgétaire de 2021-2022, il y avait un constat dans l’accord d’une avance qui avait été accordée à cette entreprise par les ministres de l’Agriculture et celui des Finances de l’époque, un montant extrêmement élevé. À l’époque, on disait qu’il devait y avoir un remboursement régulier de ce montant, que l’entreprise devait rembourser dans la caisse de l’État. »
Il ajoute : « On constate une collusion toujours entre les hauts cadres de l’État et certains opérateurs économiques, ce qui se disent puissants, des opérateurs économiques avec influence, qui entrent en collusion avec ces hauts cadres de l’État. On voit des ministres qui vont défendre des dossiers au Conseil des ministres, non pas pour l’intérêt général, mais pour leur propre intérêt, des donations réciproques promises dans le cadre de cette collusion avec ces opérateurs économiques. Normalement, c’était un dossier ouvert qui exigeait des enquêtes minutieuses. »
Il demande au chef d’État d’assurer un suivi rigoureux de cette question afin que des mesures concrètes soient prises : « Les institutions devraient jouer leur rôle. L’Institut général de l’État, la Cour des comptes, la justice devraient se saisir des dossiers et faire une enquête depuis par exemple en 2021, pour voir réellement les relations entre cette entreprise et l’État, comment ça a été exécuté. C’est un pillard sans vergogne de l’argent du contribuable, collecté à la sueur du contribuable », dit-il.
Ces propos font suite à la déclaration du ministre des Finances, en date du 27 décembre devant les sénateurs, dans laquelle il dénonçait des irrégularités dans la gestion des subventions accordées par l’État aux agriculteurs pour l’achat d’engrais chimiques. Il a également pointé du doigt des incohérences dans les montants payés par les agriculteurs à l’usine FOMI.
Ministre des Finances : « Le FOMI réclame plus de 50 milliards de plus »

D’après Alain Ndikumana, ministre des Finances : « Je détiens les contrats signés entre le gouvernement du Burundi et l’usine FOMI concernant la quantité d’engrais chimiques commandés pour les agriculteurs. Un avenant au contrat, daté de décembre 2025, indique que pour les saisons culturales B et C, 17% de la quantité contractuelle a été dépassée. Cet avenant a été présenté de manière unilatérale par FOMI et a demandé qu’il soit signé. »
Il souligne que l’usine FOMI réclame plus de 50 milliards de francs burundais, en plus des subventions déjà versées, alors que ces quantités d’engrais supplémentaires n’étaient pas prévues dans le contrat initial.
« C’est une situation honteuse. En plus de cela, FOMI réclame 24 milliards directement aux agriculteurs pour les saisons culturales B et C de l’année dernière. A-t-elle le droit de distribuer des quantités non prévues dans le contrat? »
Il ajoute : « Pire encore, un autre avenant, toujours en décembre 2025, concerne la saison culturale C de 2024 et la saison culturale A de 2025, avec une nouvelle demande de paiement pour un dépassement de 3,9% et 3,8%, soit plus de 6 milliards de francs burundais à exiger de l’État. Est-ce légalement et économiquement acceptable? Je possède toujours le contrat initial. Je refuse de signer ces avenants car cela viole les engagements initiaux. »
Le ministre Ndikumana déplore qu’il subit souvent des menaces de la part de l’usine FOMI, en raison de son refus de signer ces avenants qu’il considère comme non conformes aux termes du contrat initial. Certains sénateurs, de leur côté, plaident pour un suivi rigoureux du processus de paiement de l’engrais chimique, afin de mettre fin aux irrégularités constatées et d’éviter que le poids financier ne retombe sur les agriculteurs.